Dieu veut établir dans le monde la dévotion à mon Cœur Immaculé. Notre-Dame, le 13 juillet 1917

Lettre de liaison n° 84 (18 octobre 2018)

Chers amis,

Vingt ans avant la vision de Léon XIII relatée dans la précédente lettre de liaison, un prêtre du diocèse de Bayonne, l'abbé Louis-Édouard Cestac (1801-1868), eut une vision très semblable. Ordonné prêtre en 1825, il consacra toute sa vie à soulager les enfants dans la misère, en particulier les jeunes prostituées. Pour cela, il créa à Anglet, entre Bayonne et Biarritz, une maison pour les accueillir : Notre-Dame du Refuge. Puis il fonda une congrégation, les Servantes de Marie, pour l’aider dans sa tâche. L'abbé Cestac fut déclaré vénérable en 1976 et béatifié le 31 mai 2015.

Accoutumé aux faveurs de la Très Sainte Vierge Marie, le 13 janvier 1864, il fut subitement frappé comme par un rayon de clarté divine et vit des démons répandus sur la terre, y causant des ravages inexprimables. En même temps, il eut une vision de la Sainte Vierge qui lui confia qu’en effet les démons étaient déchaînés dans le monde et que l’heure était venue de la prier comme "Reine des Anges". L'abbé Cestac lui demanda alors :

— Ma Mère, vous qui êtes si bonne, ne pourriez-vous pas les envoyer sans que l’on vous le demande ?
— Non, lui répondit-elle, la prière est une condition posée par Dieu même pour l’obtention des grâces.
— Eh bien ma Mère, reprit le prêtre, voudriez-vous m’enseigner vous-même comme il faut vous prier ?

Et il reçut de la Très Sainte Vierge la prière suivante :

Auguste Reine des Cieux, souveraine Maîtresse des Anges, vous qui, dès le commencement, avez reçu de Dieu le pouvoir et la mission d’écraser la tête de Satan, nous vous le demandons humblement, envoyez vos légions célestes pour que, sous vos ordres et par votre puissance, elles poursuivent les démons, les combattent partout, répriment leur audace et les refoulent dans l’abîme.

Cette prière fut ensuite complétée avec les invocations suivantes :

Qui est comme Dieu ?
Ô bonne et tendre Mère, vous serez toujours notre amour et notre espérance.
Ô divine Mère, envoyez les saints Anges pour me défendre et repousser loin de moi le cruel ennemi.
Saints Anges et Archanges, défendez nous, gardez nous. Ainsi soit-il.

Cette prière ainsi complétée fut indulgenciée par saint Pie X par une instruction du 8 juillet 1908.

L'abbé Cestac raconta : « Mon premier devoir fut de présenter cette prière à Monseigneur La croix, évêque de Bayonne, qui daigna l’approuver. Ce devoir accompli, j’en fis tirer 500.000 exemplaires, j’eus soin de les envoyer partout. Nous ne devons pas oublier de dire que lors de la première impression, les presses se brisèrent par deux fois» Et sous son impulsion, cette prière se répandit dans tout l’univers catholique, accompagnée partout de faveurs extraordinaires. Ainsi, vingt ans avant la vision de Léon XIII et une cinquantaine d’années avant l’apparition de Notre-Seigneur à Padre Pio et de Notre-Dame à Fatima, la Sainte Vierge avertissait une âme privilégiée des menaces qui pesaient sur le monde.

Précision sur le petit exorcisme de Léon XIII

Suite à l’histoire du petit exorcisme de Léon XIII rapportée dans la précédente lettre de liaison, un lecteur a posé la question de savoir s’il était possible à un simple laïc de le réciter. En effet, sur l’image diffusée en 1922 avec l’imprimatur de l’archevêque de Paris, le cardinal Dubois, il est mentionné en note : « Cette prière composée pour mettre les démons en fuite, peut préserver de grands maux la famille et la société si, en particulier, elle est récitée avec ferveur, même par les simples fidèles. » Certaines publications font état de cette possibilité, allant parfois jusqu’à affirmer que Léon XIII avait lui-même demandé la récitation de ce petit exorcisme après les messes basses. Mais aucune de ces publications ne fournit la source ou la référence de cette prétendue demande de Léon XIII. Or, il y a là, selon toute vraisemblance, une erreur. Plusieurs raisons permettent de l’affirmer.

En premier lieu, étant donné la longueur du petit exorcisme, il est peu probable que Léon XIII ait demandé sa récitation après la messe.
Mais le témoignage le plus fiable sur cette question est celui du cardinal Giovanni Baptista Nasalli Rocca, (1872-1952) rapporté par Dom Amorth dans son livre Un exorciste raconte (voir la précédente lettre de liaison). [À ce propos, il y a une petite erreur dans cette lettre de liaison : les dates indiquées sont par erreur celles de son neveu Mario, lui aussi cardinal.] Le cardinal Nasalli Rocca connut personnellement Léon XIII, car en 1899, quatre ans après avoir été ordonné prêtre, il entra au service de la Curie. Dans son témoignage, il dit clairement que Léon XIII rédigea deux textes : d’une part « la prière qu’il a voulu faire réciter à toute l’Église » (la prière à saint Michel Archange), d’autre part « un exorcisme spécial figurant dans le Rituel romain » ajoutant que « Il [Léon XIII] recommandait aux évêques et aux prêtres de réciter souvent ces exorcismes dans les diocèses et les paroisses ».

Et effectivement, dans les missels édités au début du XXe siècle, après le dernier Évangile figure la prière à saint Michel Archange et non pas le petit exorcisme. Le petit exorcisme, quant à lui, fut intégré au Rituel romain sous le pontificat de Léon XIII (notamment dans l’édition de 1903), ce qui semble indiquer qu’il est bien réservé aux prêtres. En effet, le Rituel romain est un livre liturgique destiné aux prêtres et aux évêques, contenant en particulier l’ensemble des textes à utiliser pour la célébration des sacrements, les bénédictions, les exorcismes, etc. Un fidèle peut lire ces textes et les méditer, mais il ne peut pas les utiliser pour produire les effets pour lesquels ils ont été composés. Un fidèle pourrait prononcer autant de fois qu’il voudrait une formule de bénédiction sur un objet, celui-ci ne sera pas pour autant béni, car un fidèle n’a pas le pouvoir de le faire. Il en va de même pour le petit exorcisme.

Ainsi, d'après le témoignage du cardinal Nasalli Rocca, la volonté de Léon XIII fut que le petit exorcisme soit récité par les prêtres et les évêques. Et pour les fidèles, le pape rédigea une prière beaucoup plus courte en demandant qu’elle soit récitée à la fin de chaque messe basse. Cette prescription fut confirmée par Pie XI qui, en 1930, demanda que cette prière soit récitée pour la Russie. Elle fut maintenue dans le missel de 1962, issu de la révision du missel ordonnée par Pie XII et achevée par Jean XXIII.

Malheureusement, la confusion entre les deux textes de Léon XIII conduisit à des abus, des fidèles récitant le petit exorcisme pour tenter de délivrer des personnes de l’emprise du démon. Or, cette fonction est réservée aux évêques, ou aux prêtres dans certains cas. En effet, dans le rite d’ordination, parmi les ordres mineurs figure celui d’exorciste. Ainsi lors d’un baptême (en rit extraordinaire), le prêtre prononce trois exorcismes sur le nouveau-né.

Ces abus constatés dans l’utilisation du petit exorcisme conduisirent la congrégation pour la doctrine de la Foi à préciser par une lettre du 24 septembre 1985, que les simples fidèles n’étaient pas autorisés à le réciter. Ceux qui sont convaincus que Léon XIII a autorisé les simples fidèles à le réciter, refuseront probablement de reconnaître la validité de cette lettre, considérant qu’elle va à l’encontre d’une volonté de Léon XIII. S’agissant d’une simple mesure de discipline qui ne met en danger ni la foi, ni les mœurs, la véritable attitude catholique dans un tel cas est l’obéissance. Un épisode de la vie de sainte Marguerite-Marie, que nous avons fêtée hier, le montre remarquablement. Dans sa biographie – Sainte Marguerite-Marie, Sa vie par elle-même – elle rapporte qu’elle éprouva des difficultés à répandre la dévotion au Sacré-Cœur, ses supérieurs ne voulant pas qu’elle en parle. Elle s’en plaignit un jour à Notre-Seigneur, qui Lui répondit :

Je suis content que tu préfères la volonté de tes supérieures à la mienne, lorsqu’elles te défendront de faire ce que Je t’aurai ordonné. Laisse-les faire tout ce qu’elles voudront de toi : Je saurai bien trouver le moyen de faire réussir mes desseins, même par des moyens qui y semblent opposés et contraires.

La vie des saints est remplie d’exemples de ce type. Sœur Lucie elle-même en fit l’expérience lorsque le Vatican lui interdit à partir de 1960 de parler du message de Fatima, et ce jusqu’à sa mort en 2005.
En conséquence, l’attitude à avoir vis-à-vis du petit exorcisme de Léon XIII est de considérer qu’il est réservé aux prêtres et que pour nous, simples fidèles, nous avons la prière à saint Michel Archange, ainsi que la prière Auguste Reine des Cieux que Notre-Dame enseigna elle-même à l’abbé Cestac.

En union de prière dans le Cœur Immaculé de Marie.
Yves de Lassus 

                                                                   

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